« 120 battements par minute » de Robin Campillo.
Grand Prix du Festival de Cannes 2017
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Je suis allée voir « 120 battements » par minute,
le film primé à Cannes. Non parce qu’il avait été primé. Tout simplement parce
que j’ai regardé sa bande annonce. Et déjà, j’ai été scotchée.
Comment dire …
L’histoire ? Je n’ai pas besoin de vous la raconter, elle est sur tous les
médias. Mais rapidement, c’est l’histoire des débuts d’Act Up Paris, association
militante de lutte contre le Sida, mais aussi une histoire d’amour, très belle
et magnifiquement interprétée.
Le film est brut, je veux dire par là qu’il montre les
différentes facettes de l’association : les réunions hebdomadaires, l’organisation
de leur participation à la Gay-Pride (d’où est tirée l’affiche sublime du film),
bien évidemment l’activisme de l’association, la non-violence, mais aussi la
maladie, l’indifférence, les traitements, la joie, la peur …
Il faut se remettre dans les années 1990. Personnellement, je
n’habitais pas Paris, mais j’écoutais les infos. Et les bêtises ; je me
souviens d’une maman « très bien » de l’école où je travaillais à l’époque
qui m’avait branchée sur le sujet (je n’aurais jamais cru ça d’elle) : « Mais, c’est quand même un peu de leur faute, non ? – Euh, attendez,
je ne comprends pas. – Et bien oui, ils l’ont cherché un peu, non ? ».
Bref, je tenais à mon poste, je gardais de surcroît ses enfants, mais j’avoue
que cette dame, qui me paraissait être une sainte par rapport à certaines « chipies
du club » (et je reste polie) m’a ce jour-là donné envie de vomir. Et je
me suis dit : « Comment peut-on ? Une telle bêtise, une telle
méchanceté … Jamais, jamais, je ne dirai ça. Et mes enfants ne seront pas
élevés dans la haine de l’autre, ou dans son indifférence ».
Revenons au film. J’ai pleuré. Je n’ai pas honte de le dire.
Et pourtant, je sais. Comme tous. Mais j’ai pleuré. Et plus d’une fois. En sortant,
la fin m’a tellement happée (je vous laisse découvrir) que mes yeux étaient
bleus. Et quand mes yeux sont bleus, c’est qu’il pleut … Or, il ne pleuvait pas.
"L’industrie pharmaceutique qui traîne des pieds, ce n’est pas
vrai !" Mais bien sûr que si ! Et pas que contre le Sida, d’ailleurs. Mais
du Sida, on mourrait vite. Et on meurt encore.
J’ai accepté lors d’un grand malheur personnel d’être contributrice d’un
projet afin que bouge cette fameuse industrie pharmaceutique. Je ne vous dirai pas le temps
que cela a duré. Et les réponses que je n’ai jamais eues. Mais moi, au point où
j’en étais, je pouvais attendre. Pas eux, eux n'avaient pas le temps. Ils voulaient vivre.
Les personnages sont remarquables dans leur interprétation.
Tous. Les pleurs, les batailles, le militantisme, la maladie, la mort, mais
aussi, le désir de vivre de cette jeunesse qui ne comprend pas, les
informations qu’elle donne, même quand on ne lui demande pas. Rien n’est caché.
Le Sida a tué, et tuera encore. Ce film magnifique montre
que certaines personnes ont eu du cran, les militants, mais aussi ceux qui les
écoutaient ou les laissaient faire (la prof qui a dit ok, écoutez-les, bravo, j’en ai connu des comme ça). Parce qu’à l’époque, on se débarrassait du Sida simplement soit en n'en parlant pas, en n'informant pas, ou en disant :
ça ne peut pas m’arriver, je ne vis pas comme eux. Ben si !
A présent, on sait. Mais les jeunes qui n’ont pas vécu les
années Sida ne se protègent plus pour certains. « 120 battements par
minute » est un film remarquable, qui devrait être diffusé dans les
lycées. Oui, ok, il y a des scènes d’amour, mais bon, croyez-vous qu’au lycée, les jeunes ne les
ont pas déjà vues (avec tout l’informatique dont ils sont entourés) ?
Et franchement, ne vaut-il pas mieux donner un message de
prévention, encore et encore, plutôt que de se voiler la face et laissez mourir ?
Merci à Act-Up Paris pour son courage, car il en faut.
Pensées à tous ces jeunes trop tôt disparus, dans l’indifférence.
Bravo pour ce film magnifique.
Il prend aux tripes.
Il aurait mérité la Palme d’Or.
Je vous le conseille.
Prenez soin de vous !
La Muse, très émue |
Le Président du Jury de Cannes, Pedro Almodovar, a été enthousiaste et ému par ce film "Campillo raconte l'histoire de vrais héros qui ont sauvé des vies".
La chronique des Inrocks (très bonne chronique) :
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